Le mal-épris
Comme je le disais dans mon bilan de fin d’année, Bookstagram est devenu le « The Voice » de l’édition française. Bénédicte Soymier fait partie des candidats prometteurs. Ce n’est pas une surprise. Un écrivain en herbe demanda un jour à un auteur reconnu comment il perfectionnait son écriture. Il répondit qu’il fallait « lire, toujours et encore, lire ».
La jeune autrice maîtrise l’art du récit, évite les chausse-trappes et les maladresses d’un premier roman. On ressent dans son récit un amour sincère de la langue.
Ce qui m’a impressionnée, c’est sa capacité à se glisser dans la peau d’un homme, et de nous faire vivre ses pensées les plus inavouables. Elle saisit parfaitement les changements d’humeur, les troubles de l’instant, les dangers du silence, la tyrannie des hormones.
L’histoire, en soi, est assez banale. Un type moche (l’auteur insiste un peu trop, à mon goût) et frustré, obsédé par une femme trop belle pour lui, mal aimé, complexé, incapable de sortir d’une spirale où s’entrelacent le désir et la violence. C’est l’histoire d’une impasse, des sentiments mal ordonnés. La compassion n’est pas le plus court chemin vers l’amour. La sensualité n’est pas le réconfort d’une âme meurtrie. Paul, l’anti-héros, en fera l’amère expérience, handicapé par une enfance traumatisante.
Je n’ai pas été convaincue par le style, proche du morse, elliptique voire épileptique. Les successions de phrases courtes (souvent sans verbe), de mots orphelins et mitraillés, sont efficaces pour accentuer l’intensité d’une scène (ex : p127, 142, 160, 186) mais elles peuvent lasser, voire exaspérer.
Bilan : 🌹