Heureuses nouvelles sur avions en papier
Les auteurs qui bradent la mémoire de la Shoah pour attirer l’attention commencent à m’exaspérer. Les récits portant sur les malheurs du peuple juif sont pléthores, et pas toujours du meilleur goût. Le barbier, le pianiste, l’accoucheuse, le cuisinier, le tatoueur d’Auschwitz… La Shoah devient cet ingrédient magique, ce facteur X surpuissant, provocateur instantané d’émotions, dont on abuse sans retenue ni dignité. Je ne doute pas de la sincérité et de la légitimité de la majorité des auteurs (je ne vais pas faire du Camille Laurens) mais quelquefois, mieux vaut s’abstenir.
Comme ici, avec le dernier livre de feu Juan Marsé. Je vous le résume, ça va être vite expédié. Une mamie zinzin se divertit à balancer des avions en papier de son balcon et demande au fils de sa voisine de les ramasser. Il est clair qu’un truc la chiffonne, qu’avec l’âge avancé, des souvenirs douloureux lui font perdre la boule. Alors l’auteur pose ses gros indices au fil du récit : un père qui s’en va, la manie de tout garder, quelques troubles obsessionnels, le fantôme jaune d’un oiseau, des rendez-vous manqués jusqu’à l’évocation de ces enfants errants qui lui rappellent les petites victimes du ghetto.
Cet entre-deux m’a gênée. Ni misérabiliste (pas de pages larmoyantes sur les souffrances endurées) ni tragi-comique (de toute façon, dans ce registre, seul Roberto Benigni s’en est sorti), l’auteur espagnol nous livre une nouvelle bâclée et sans âme. On passe.
Bilan :🔪