Terrasses

Terrasses

Il paraît qu’il faut dix ans pour avoir le recul nécessaire sur les évènements les plus tragiques de notre histoire, pour ne pas se laisser gagner par une émotion excessive, par l’horreur de ce que l’on a vécu.
Il a fallu dix ans à Laurent Gaudé pour faire exactement le contraire : adopter le regard de ceux qui ont vu l’innommable et retranscrire l’émotion profonde de la seconde où tout a basculé. Le résultat est à la hauteur de l’ambition même si les premiers chapitres, ceux des terrasses, m’ont moins convaincue. Ils s’empèsent de la rengaine de la catastrophe à venir. Gaudé parvient néanmoins à traduire la stupeur et l’absurde par des formules qui bouleversent (« (…) Parce que les Parisiens sentent bien que c’est peut-être la dernière soirée douce avant l’hiver et je n’arrive pas à démêler, en mon esprit, si c’est un détail plus cruel encore, comme un piège que le beau temps fait à la jeunesse ou, au contraire, un dernier cadeau de la vie »).

Le récit des attentats est plus convaincant parce que l’auteur réussit à décrire l’ébahissement de ces héros confrontés au plus grand défi de leur vie, qu’ils soient médecins, infirmières, membres des forces spéciales ou simples voisins réquisitionnés pour la circonstance. L’auteur trouve les mots justes pour décrire leurs gestes et leur insondable désarroi.

Il est un monstre qui surgit de manière récurrente dans ce livre, un monstre auquel, depuis la nuit des temps, les hommes ont tenté de donner un visage. En vain. C’est le hasard.

Bilan :🌹

Le barman du Ritz

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