Voyage au bout de l'enfance

Voyage au bout de l'enfance

Le totalitarisme n’est pas un produit exclusif de la seconde guerre mondiale et des idéologies qui en ont précipité l’horreur. J’en rappelle la principale manifestation : la volonté de contrôler les corps et les esprits. Margareth Atwood s’en fait l’écho dans La servante écarlate, persécutée par l’ignoble régime de Gilead (en territoire américain). Rachid Benzine en montre ici l’infernale logique (loin du paradis promis) sur les terres de Daech, avec une nuance de taille : il ne s’agit pas d’une fiction mais d’une réalité contemporaine, abjecte et brutale (éloquentes pages 23, 28, 32, 41).

En choisissant la voix d’un enfant, l’auteur prend la posture de l’innocence et de l’étonnement. Elle permet de s’affranchir des préjugés adultes et de ne relater que les faits – dans toute leur cruauté. Imre Kertész avait adopté le même procédé dans son incroyable livre, « Être sans destin ».

De Sarcelles à la frontière Kurde en passant par Raqqah en Syrie, on suit Fabien devenu Farid, entraîné dans une aventure qu’il ne comprend pas. Une nouvelle vie qui ressemble si peu à celle d’un enfant, normalement synonyme d’insouciance, de sourires et de jeux. 

Comme toujours, en lisant les romans de Rachid Benzine, on réfléchit, on se pose les questions qui perturbent, à la lumière blafarde des actualités qu’on nous jette aux yeux : à partir de quel moment cesse-t-on d’être un enfant ? Devient-on bourreau à son tour, en étant le bourreau des anciens bourreaux ? De quoi est fait le pardon ? 

Par son humanité et sa simplicité, ce poignant récit vaut plus que tous les reportages que vous verrez sur cette tragédie.

Bilan : 🌹🌹

Le lac de nulle part

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