L'explosion de la tortue
Noyé au fond de l’aquarium. À propos de « l’explosion de la tortue ». J’accuse le journaliste qui a recommandé ce livre de ne pas avoir franchi la page 30 car s’il était allé au-delà, il n’aurait pas réussi à convaincre des gourdes telles que moi de dépenser 18,50 euros pour ce qui reste un exercice de style, virtuose mais vain. Peut-être ce journaliste est-il à l’origine du pari qui a conduit Chevillard à nous parler de la carapace d’une tortue sur 250 pages ? Allez, Éric, pas cap ! Malheureusement, il est cap, très cap même! L’auteur est un érudit qui manie l’absurde, le décalage, le sarcasme et le troisième degré avec brio. Son écriture est soignée, ses aphorismes souvent géniaux mais le début de ce livre ressemble à une bande-annonce de film mensongère parce qu’elle y concentre les seuls gags d’un film par ailleurs sans intérêt. On s’ennuie avec cette tortue. Tortue devient torture. Et qu’elle soit prétexte à évoquer un écrivain raté et des souvenirs d’enfance n’arrange rien. Ce qui sauve la tortue du naufrage, c’est l’humour doux-amer de Chevillard, maître à penser d’une génération d’auteurs et d’humoristes qu’il a dû inspirer pour le meilleur (ex: Chris Esquerre, Tanguy Pastureau) ou pour le pire (ex: Arnaud le Guilcher, Fabrice Caro quand il écrit des romans). Quitte à se délecter du seul plaisir de l’esprit, au détriment d’une narration plus consistante, autant lire le jamais égalé Dictionnaire du pire de Stéphane Legrand. Le livre de Chevillard m’agace parce qu’il est représentatif d’une arnaque littéraire contemporaine : les ricanements et les excès d’enthousiasme pour quelques mots bien tournés. Le seul avantage de ce bouquin, c’est qu’on peut le commencer à n’importe quelle page sans rien perdre de l’intrigue.
Bilan : 🔪🔪🌹