Cent millions d'années et un jour
L’homme qui a gardé son âme d’enfant court après un rêve. Celui de Stan, paléontologue, est de retrouver le squelette d’un dinosaure qu’un vieillard aurait entraperçu dans les Alpes. Les preuves sont maigres, l’entreprise insensée. Il s’élance, pourtant, conquérant de l’inutile. Il y a une vérité que les fonctionnaires de la raison ne comprendront jamais ; elle fait tourner la terre depuis deux mille ans : on peut attendre une vie entière la récompense de son obstination, puis la sacrifier au nom de la passion qui nous anime. C’est ainsi que les aventuriers donnent du sens à leur existence. Sur ce principe, on cherche le graal, l’arche perdue, on suit les traces de l’abominable homme des neiges, on veut retrouver Tchang, on croit au monstre du Loch Ness, on plonge vers un trésor englouti. Le voyage est plus important que la destination bien-sûr et s’il y a quête, elle est de soi-même, de réponses et d’absolu. Jean-Baptiste Andréa ressuscite la magie d’Hergé et de Jules Verne. La gravité et la profondeur en plus. Quelle émotion de retrouver mes sensations d’enfance, de m’associer aux bonheurs et aux déceptions des explorateurs ! Il m’a semblé entendre la voix de Daniel Costelle louant l’acharnement des pionniers qui firent la conquête des pôles. Ils sont intrépides, audacieux, un peu fous. La chance est leur secret, l’espoir leur unique boussole. Stan est l’un de ces héros. Un misanthrope qui s’intéresse aux fossiles, aux choses « vivantes mortes il y a longtemps ». Sur les pentes du glacier, il efface les occasions manquées : Mathilde dont il n’a pas osé toucher la poitrine adolescente, son salaud de père que la balle du fusil a raté… par manque de recul (superbe ironie). Après le magnifique « Ma reine », Andréa transforme l’essai. Peu de reproches : une fin moins intense, et un usage trop fréquent du mot « monde ». Des futilités, au regard du plaisir intense éprouvé à la lecture de son deuxième roman.
Bilan 🌹🌹