Ta promesse
Camille Laurens est la maîtresse du langage amoureux. Elle saisit les nuances, les silences, le poids des mots, le choc des propos. Elle passe le cœur au révélateur des paroles et des non-dits. Son ouïe est fine, son regard acéré. Aucune fausse note ne lui échappe.
Alors pourquoi son héroïne, Claire (il est… clair que son personnage s’inspire de sa propre expérience) ne perçoit-elle pas les dissonances, aussi grossières soient-elles ? Pourquoi ne comprend-elle pas que la douce musique de chambre vire à la paillardise ?
C’est pour y répondre que le récit convie derrière le miroir sans tain les amis, les collaborateurs, les juges, les psys et, in fine, les lecteurs. Sur 358 pages en petits caractères, on assiste au dérèglement progressif du couple, à l’aveuglement de Claire qui porte si mal son nom. Ne voit-elle pas qu’elle est sous l’emprise de Gilles, le séducteur, le pervers narcissique, le manipulateur, le Dom juan 2.0, le c…..d ? À moins que l’amour ne la fourvoie.
L’amour. En son nom que ferait-on (« On a envie que l’amour existe. Que l’amour résiste ») ? De folles promesses, que les hommes trouveront naïves et que des femmes portent comme un étendard, les yeux embués : « ne me trahis pas ». Et la promesse de Gilles ? « N’écris pas sur moi ». Raté. Son portrait est un petit chef d’œuvre (« Tu n’éprouves pas l’amour mais tu excelles à le prouver »).
Si le roman pèche par ses longueurs (une impression de tourner en rond), il confirme que Camille Laurens est une immense écrivaine, capable de formidables intuitions (ex p242, 277-281).
Appréciation : 🌹🌹