Suiza
Le thème de la fille sensuelle avec un léger grain qui fout le bordel dans un petit pays n’est pas nouvelle. Il suffit de se souvenir de « Elle » (Adjani) dans l’été meurtrier (Sébastien Japrisot), de « Lilas » dans l’été en pente douce (Pierre Pelot) ou même de « Betty » dans 37,2° le matin (Philippe Djian). Une fille qui baise comme on moissonne (c’est la nature), un type qui en pince pour elle et un village qui s’en trouve totalement bouleversé. Suiza ressemble plus à la fille rousse « Therèse H. » du film de Walerian Borowczyk (cité par l’auteur) qu’à la gracile Adjani mais pour le reste, il y a beaucoup de similitudes. Ajoutons-y la sensualité de « Jamon, Jamon » (Bigas Luna) et la boucle est bouclée. D’ailleurs, dans les références hispaniques, ce serait plutôt du côté de « Lucia y el sexo » qu’il faudrait aller pour la confrontation permanente entre éros (Suiza) et Thanatos (le cancer de Tomas). Dans ce village de Galice, le bonheur est fugace et la mort attend son heure. Malgré ce petit manque d’originalité, Suiza est un roman jouissif qu’on ne lâche pas facilement. L’auteur a construit des personnages forts, cohérents, qu’on regrette d’abandonner à la fin du livre. L’évocation du désir et de ses contingences, est remarquable. En lisant les scènes de sexe, brute et sensuelle, on se dit que les écrivaines sont souvent plus douées que les hommes pour écrire des scènes de cul qui nous émoustillent. Sans doute parce que la sexualité masculine ne leur fait plus mystère et que, venant d’elles, la grossièreté assumée passe plus facilement. À ce propos, je déplore juste les chutes de ton de la sodomie dans les roseaux ou les références à Stallone (inutiles). Et puis Suiza peintre, ça fait carte postale. Il faut se rappeler que c’est un premier roman. Il en a toutes les qualités (verve, candeur) et presqu’aucun défaut (naïveté). Une belle découverte.
Bilan : 🌹🌹