Une histoire italienne
Un premier roman réussi. J’avais sorti mon sabre, parée à l’éraflure. Car les Français qui parlent d’Italie peinent à sortir des clichés. Je pense notamment au « Soleil des Scorta » de Laurent Gaudé ou à « Je cherche l’Italie » de Yannick Haenel. Mais nos jeunes auteurs tutoient parfois le génie lorsqu’ils se frottent à la botte. Ce fut le cas de « La piste Pasolini » de Pierre Adrian et donc, aujourd’hui, d’une « Histoire italienne ». La principale qualité de ce roman est sa sincérité et son humilité. La petite histoire du héros, Attalo Mancuso, se confond avec la grande histoire de l’Italie fasciste dont Laura Ulonati examine avec malice tout le ridicule, à l’image de Benito Mussolini, acteur principal d’une représentation qui vire au tragique en Abyssinie. C’est un des mérites de ce livre : revenir sur cette antichambre des accords de Munich que fut l’abominable écrasement de l’Éthiopie. Et l’auteure de souligner qu’ils étaient bien loin les « Italiens, braves gens », ces soldats qu’on ne pouvait pas prendre au sérieux. En Afrique Orientale, ils jouèrent une macabre comédie. Laura Ulonati a une écriture aérienne, servie par des formules qui font mouche. Elle expose les égarements du fascisme, sans voyeurisme ni sensationnalisme, avec l’absurde en ligne de mire : « Voilà comment s’égare un peuple : en étouffant sous des pampilles illusoires le sel de ceux qui sculptèrent patiemment, les terrasses sur la surface des montagnes, y faisant croître l’olivier, le blé, la vigne ». Ulonati malmène ses héros (Mancuso et l’Italie) avec intelligence et tendresse. Ce fut donc un très bon moment de lecture. Je ferais cependant deux reproches. Le premier, c’est l’usage excessif des mots italiens dans le texte, pas toujours nécessaires (ex : palazzo pour palais), et qui semblent là pour asseoir le pédigrée de l’auteure. Le second, c’est la fin, facile et paresseuse. Dernière recommandation : lisez la préface de ce livre après l’avoir terminé - il faudrait toujours procédez ainsi, d’ailleurs.
Bilan : 🌹🌹